Pourriez-vous vous présenter en quelques phrases ?
Quel a été votre parcours scolaire / professionnel ?
J’ai fait mes études à Supinfocom Valenciennes (4 années à l’époque, je suis sortie diplômée major de promotion en 2001).
Ensuite, j’ai travaillé à Paris chez DURAN sur du clip et de la publicité. Mais il y avait pénurie d’emploi à l’époque (suite au 11 septembre 2001, tous les budgets américains étaient bloqués). J’ai donc fait un peu de tout : de l’architecture, de la PAO…
Comme je ne me plaisais pas vraiment dans les grands studios (j’ai fait ce métier pour raconter des histoires, pas pour faire de la publicité pour des grandes marques !), j’ai pris un chemin de traverse peu courant à l’époque. J’ai fondé une association, Je Regarde, un collectif d’artistes de tous horizons. Cette structure m’a permis de partir en quête de financements pour faire mes propres films.
J’ai donc monté plusieurs projets (clip, spot publicitaire, ..) en tant que « brouillons » pour mon premier court-métrage professionnel : Premier Automne. Il a eu un certain succès, a remporté quelques beaux prix comme celui du meilleur court-métrage animé au festival de Tokyo Short Shorts. J’ai ensuite mis sur pied Mishimasaiko en m’appuyant sur l’univers de l’artiste japonaise Minchi.
Comment en êtes vous arrivé à faire ce type de travail ?
J’ai eu la chance de ne jamais me poser la question de ce que je voulais faire : j’ai toujours dessiné, toujours raconté des histoires et la passion ne m’a jamais quittée. Cela a été un prolongement logique de faire de ma passion mon métier.
Il y a quand même eu un petit « hic » dans mon parcours : en fait, je voulais plutôt faire de l’animation traditionnelle ! Mais finalement dessin ou images de synthèse ne sont que des outils, donc je suis quand même dans le domaine que je visais.
Comment pourriez-vous décrire votre travail ?
Je pense être un profil un peu atypique. En tant que réalisatrice indépendante, les projets ne sont pas un flux permanent : il me faut le temps de les écrire, de les mettre sur pied, de les réaliser… Mais contrairement à beaucoup de réalisateurs que je connais, je ne travaille plus en studio pour de la prestation lorsque je ne réalise pas : ça m’abime l’envie de créer !
Je suis donc aussi bibliothécaire. J’ai trouvé pendant longtemps un équilibre entre un poste en bibliothèque à mi-temps (au Conservatoire de Lille, ce qui m’a permis de rencontrer mon compositeur attitré) et mes créations personnelles.
Aujourd’hui, j’interviens à Objectif 3D et poursuis mes activités indépendantes en parallèle.
À quoi ressemble une journée type ?
En période de production de film, c’est simple : 8 à 18 heures de 3D par jour… Et le reste pour manger et dormir (peu) !
En période de développement de projet, quand je ne suis pas à l’école, je partage mon temps entre :
– la préparation de mes cours
– le travail administratif (communication autour de mes films, organisation de ma participation à des festivals ou des jurys, …)
– le dessin et l’écriture de scénario
Je boucle l’administratif le matin et crée en journée et la nuit. Le soir, je regarde des films ou lis des BD pour l’inspiration…
J’ai la chance d’être mon « propre patron » mais cela exige beaucoup de discipline.
Quels sont les postes qui sont en relation directe avec le votre sur une production ?
Tous !
En tant que réalisatrice de courts-métrages, je collabore aussi bien avec des scénaristes que des storyboardeurs, des directeurs artistiques ou techniques, des animateurs, des modeleurs, des lighters…. Dans le court-métrage indépendant, on fait beaucoup soi-même et on est en prise directe avec tous les membres de nos équipes, plutôt restreintes.
Quels sont les atouts majeurs des personnes sur ce type de poste ?
La fiabilité et la motivation.Par fiabilité, j’entends : connaitre ses forces, ses faiblesses et ses limites.
Je préfère un collaborateur qui me dise « je n’en suis pas capable » pour que nous trouvions des solutions… Plutôt qu’un silence qui se soldera par du retard, du temps et de l’argent perdus difficiles à compenser et des solutions à trouver de toute façon !
Par motivation, je veux dire que je préfère un collaborateur de niveau moyen mais qui va donner tout ce qu’il a plutôt qu’un bon technicien qui fera le minimum. A qualité de travail un peu différente, le comportement et l’envie sont prioritaires à mes yeux car ils sont indispensables pour faire tenir le ciment d’une équipe. Quelqu’un de moyen finira toujours par progresser s’il en a l’envie de toute façon !
Quel est le dernier film que vous avez vu ? Votre film préféré ?
Le dernier que j’ai vu est « Satantango » de Bela Tarr. Un film magnifique, trilogie de 6 heures avec des plans-séquence incroyablement longs et une photographie très travaillée.
Mon film préféré… Impossible à dire ! J’hésite entre plusieurs films de Murnau, Kurosawa ou Tarkovsky.
Quel est le dernier film sur lequel vous avez travaillé ?
Mishimasaiko, mon dernier court-métrage achevé en décembre 2015.
Son avant-première à Montpellier est programmée au 10 mai 2016 au cinéma !
Quels conseils donneriez vous aux jeunes qui réfléchissent à travailler dans le monde du cinéma ?
Depuis le début de l’année vous intervenez régulièrement à Objectif 3D, que vous apporte cette expérience ?
Cela m’a obligée à reprendre des fondamentaux, des choses que je connaissais d’instinct ou de pratique, mais que j’aurais eu du mal à énoncer de façon construite.
Comme j’interviens sur le scénario et le storyboard qui ne sont pas toujours des matières qui intéressent les élèves, j’ai un beau challenge à relever : leur faire réaliser l’importance que ces outils ont et la nécessité pour eux de les comprendre.
Faire de la belle 3D, c’est bien. Pour servir un beau film, c’est quand même mieux !